Faut-il remplacer votre moniteur par une TV ?

Article publié le 4 Juillet 2018

Dernière modification 7 Mars 2025

Un grand écran, c'est toujours plus immersif et jouissif qu'une lucarne. Mais est-ce bien raisonnable de remplacer votre moniteur par un téléviseur ? Nous avons fait le test et vous expliquons tous les écueils à éviter avant de sacrifier vos économies dans une TV géante.

Lorsque l'on parle d'écrans, il y a toujours plusieurs critères qui font briller les yeux de geeks : taux de rafraîchissement et réactivité pour les joueurs, définition pour d'autres, quant aux graphistes ils sont plus sensibles aux notions de contraste ou de couverture et reproduction colorimétrique. Mais s'il y a bien un critère qui fait immanquablement fantasmer tout un chacun, c'est bien la surface d'affichage, ou plus précisément la diagonale. Quel critère absurde d'ailleurs que cette diagonale qui ne parle à personne ! Il faudrait parler de largeur (au grand avantage des écrans 21 :9) ou de surface (afin de mieux imaginer le gain en passant d'une taille à l'autre). Et en plus, les anglophones nous ont imposé leur pouces histoire de rendre la chose encore plus abstraite.

Attention à la redevance

Attention toutefois à vos futurs achats si vous venez de vous installer, car qui dit téléviseur dit aussi redevance audiovisuelle. Peut-être ne comptez-vous utiliser votre TV qu'en tant qu'afficheur, de la même façon qu'un moniteur et sans jamais utiliser son tuner. Mais ça n'empêche que vous devrez payer votre redevance, les 2 conditions étant de posséder un téléviseur et de payer une taxe d'habitation. Si vous ne payiez pas cette redevance auparavant, sachez qu'il vous en coûtera 138 € en France (88 € dans les DOM) et 100 € en Belgique. Celle-ci est due à l'année, et aucun prorata ne peut être appliqué, attention donc au moment où vous achetez et déclarez votre TV. D'ailleurs, notez que le vendeur de votre TV ou votre opérateur est habilité à prévenir les autorités que vous êtes imposable. La redevance est une taxe déclarative, c'est-à-dire qu'elle n'est adressée qu'aux contribuables qui en font la demande. Mais avant de vous lancer dans une fausse déclaration, sachez qu'en Belgique comme en France, les autorités peuvent remonter jusqu'à 3 ans, et l'amende pour une fausse déclaration équivaut plus ou moins à doubler la redevance pour chaque exercice non payé. Autrement dit, vous pourriez très bien vous retrouver avec une facture de 700 € en Belgique et près de 1000 € en France en cas de fausse déclaration !

On pourrait signaler que cette redevance est excessivement mal faite : ceux qui regardent la TV via leur FAI internet et sur un ordinateur muni d'un moniteur PC n'ont pas à la payer, mais ceux qui ont une TV qui leur sert à afficher le contenu de leur PC (sans jamais consulter la télévision) devront s'en acquitter. Si l'envie vous prend de contester ces principes ou de déclarer que vous ne possédez pas/plus de TV, sachez que les autorités risquent fortement de vous contrôler de façon régulière (plusieurs fois par an) afin de vérifier que vous n'êtes effectivement pas éligible.

Un problème de taille

Mais c'est tout de même une bonne chose : commençons par démystifier tout cela. Pour passer des pouces aux centimètres, il faut multiplier par 2,54 (environ). 28" donnent donc environ 71,1 cm. Le carré de cette diagonale - rappelez-vous vos cours de trigonométrie - est égal à la somme des carrés des deux côtés opposés. Puisque le ratio d'écran est connu (il suffit de se référer à la définition), on sait que de nombreux écrans possèdent un ratio de 16 :9, c'est-à-dire que le rapport entre la largeur et la hauteur est de 16 pour 9. Autrement dit, divisez la longueur par 16, multipliez par 9 et vous aurez la hauteur. Quelques formules à base de racine carrées plus tard, on obtient donc 62 cm de large pour 34,9 de haut. Soit une surface de 2162 cm2. Cette valeur ne vous dit strictement rien, et c'est normal.

Mais si on la compare aux 1588 cm2 d'un moniteur 24", cela signifie que notre modèle 28" affiche une image 36% plus grande : on gagne presque 9 cm en largeur et 5 en hauteur ! Considérons maintenant l'upgrade vers un modèle 32" : surface en hausse de 30% avec encore 9 et 5 cm de plus en largeur et hauteur respectivement.

Ces mêmes mathématiques nous diront que pour doubler la surface d'affichage, il suffira de multiplier la diagonale par la racine carrée de 2. Soit 1,41 environ. Ce qui donne 39.6" environ. Un simple écran 40" vous fournira donc une image 2 fois plus grande ! Et avec un écran 55", la surface est encore multipliée par 2, l'image est donc 4 fois plus grande que l'écran 28" !

TV vs Moniteur

Vient alors une question toute naturelle : « et si je remplaçais mon moniteur PC par un téléviseur ? ». Les TV sont en effet assez abordables : comptez 800 € pour un modèle 55" UHD (la fourchette varie entre 500 et 1200 € pour la majorité des modèles), environ 500 € pour un modèle 40" UHD et dès 300 € pour la même diagonale mais en FHD. Vous aurez en prime un très (trop ?) large choix par rapport aux moniteurs PC dont les modèles de 40" ou plus se comptent sur les doigts d'une main. Pourquoi d'ailleurs ? Qu'est-ce qui différencie vraiment une TV d'un moniteur PC ? A la fois beaucoup de choses et très peu. Les points évidents d'abord. Un moniteur n'intègre jamais de tuner TV, vous n'êtes donc pas soumis à la redevance audiovisuelle (et accessoirement cela peut vous permettre de regarder la TV dans votre bureau). Une TV intègre toujours une télécommande qui permet quelques réglages sans devoir triturer les boutons de l'OSD, et des haut-parleurs de médiocre qualité, certes, mais ça dépanne. Ensuite, les TV se contentent généralement d'entrées HDMI, il faudra donc vous assurer de disposer des sorties vidéos adéquates sur votre PC, ou de disposer des bons adaptateurs. Elles ne bénéficient pas non plus de pied réglable, mais à ce niveau, c'est surtout un problème de taille et de poids, les moniteurs 40/43" en étant eux aussi dépourvus. Les TV sont aussi dépourvues des mécanismes tels que G-Sync ou FreeSync, puisque ceux-ci passent par le DisplayPort et toutes les TV sont forcément au format 16 :9. Pas de 21 :9 ni aucun autre format original. Enfin, l'électronique intégrée aux TV pour le traitement de l'image est très différente et elles peuvent carrément intégrer un OS (les fameuses Smart TV) qui vous permettra de vous dispenser de PC (ou d'autre machine) pour afficher du contenu.

Fréquence de rafraichissement

Alors que les moniteurs PC fonctionnent en majorité à 60 Hz et qu'il faut payer relativement plus pour des modèles 120, 144, 165, 200 ou même 240 Hz, de très nombreuses TV affichent 100, 200 ou 400 Hz, certains grimpant même à 1200 Hz. Ces fréquences sont même compatibles avec les TV UHD alors même que le HDMI 2.0 qui les alimente ne peut pas acheminer plus de 60 images par seconde dans cette définition. Comment est-ce donc possible ? En un sens, les TV sont un peu supérieures aux moniteurs puisqu'elles sont capables d'afficher des fréquences de rafraîchissement natives supérieures. Alors qu'il n'existe aucun moniteur UHD de plus de 60 Hz, il existe bel et bien des TV UHD à 100 ou 200 Hz (fréquences doublées et quadruplées par rapport à la base de 50 Hz). Pour « remplir » ces 100 ou 200 Hz, les TV intègrent 2 mécanismes : l'insertion et l'interpolation d'images. Dans le premier cas, on clone simplement les images pour doubler le nombre d'images affichées par seconde.

L'interpolation va plus loin puisqu'un processeur vidéo va analyser une image et la suivante, en générer une intermédiaire et l'intercaler entre les 2. Ceci permet donc de doubler le nombre d'image par secondes, voire de le quadrupler si on génère 3 images intermédiaires.

Jusque-là, même si la TV n'affichait pas les images originales de la source, elle rafraîchissait bien sa dalle assez souvent pour afficher toutes ces images supplémentaires. Mais pour aller plus loin, les constructeurs intègrent des modes intelligents de rétroéclairage. A chaque image (native ou interpolée), le rétroéclairage va clignoter à très haute fréquence, éclairant alors les images en 2 fois : d'abord le haut et ensuite le bas, ou d'abord le milieu et ensuite les bords. On peut aussi rajouter une modulation de l'intensité du rétroéclairage afin de plus ou moins éclairer certaines zones. Mettez tous ces effets bout à bout et vous pouvez rapidement atteindre 800 Hz. Si vous voulez comparer les caractéristiques à celles d'un moniteur PC, cherchez la fréquence de rafraîchissement « native », hélas pas toujours mentionnée dans les fiches techniques.

Mais toutes ces fonctions génèrent des « fausses » images. Si ce n'est pas forcément gênant en jeu (d'un point de vue fluidité), ça l'est beaucoup plus lors du visionnage de films, initialement filmés en 24 images par seconde. Le surplus de fluidité provoque un effet « soap opéra » en lissant beaucoup trop les mouvements et en supprimant tout flou de déplacement. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle les mode Cinéma des TV désactivent en général toutes ces fonctions.

On retrouve aussi des mécanismes d'amélioration de la netteté, des couleurs ou des flous. Toutes ces fonctions ne sont pas forcément gênantes pour les vidéos, mais pour la retouche photo et encore pire, pour le traitement de texte, cela aura tendance à perturber votre image et vous forcera probablement à tout désactiver.

Lag et réactivité

A l'exception de l'insertion d'image, tous les artifices que nous avons cités auparavant demandent un temps de calcul. Celui-ci s'exprime en millisecondes et ne viendra donc pas perturber la synchronisation audio et vidéo de vos films (et quand bien même ce serait le cas avec un ampli, vous pouvez rajouter un retard audio au besoin). Vous visionnerez donc le flux vidéo en retard par rapport à sa génération, mais il sera fluide et synchronisé. Mais pour les jeux, ce sera une autre paire de manches. Tout ceci rajoute un retard à l'affichage qui peut se chiffrer en dizaines de millisecondes. Cumulé aux autres latences, inhérentes au rendu 3D et vous aurez bien rapidement un trop gros décalage entre vos actions et l'image. Imaginez voir un ennemi à gauche. Vous déplacez votre souris dans cette direction, mais l'effet n'est pris en compte que 5 ou 6 images plus tard à cause du retard à l'affichage. Pendant tout ce temps, vous aurez été vulnérable. Et lorsque vous épaulerez enfin pour tirer, l'ennemi aura déjà bougé. Dans les jeux contre l'IA ou les mouvements sont relativement prévisibles (et les cibles assez statiques), ce n'est pas forcément gênant, mais en multijoueur, vous verrez très vite la différence. Vous devrez donc quasiment toujours désactiver toutes ces fonctions pour les jeux aussi.

A cela, il faudra rajouter un input lag de base pas toujours très flatteur. En effet, les TV ne sont pas optimisées pour la réactivité, ce n'est pas un cheval de bataille pour les constructeurs et ils se concentrent donc sur autre chose. Même en désactivant tous les artifices de fluidité, il n'est pas rare de constater un input lag de 50 ms contre 20 à 30 ms pour de nombreux moniteurs. Rajoutons à cela un temps de rémanence plutôt élevée et les compétiteurs ne seront déjà plus intéressés. Cette rémanence assez prononcée s'explique en revanche par l'utilisation massive de dalles VA, dont c'est le point faible, mais qui compensent par un contraste très élevé (entre 3000 et 5000 :1). Voilà qui fera la joie des amateurs de photos et de films.

Définition et distance d'affichage

Si vous êtes convaincu de vouloir un écran large, encore faut-il vous décider sur la définition de celui-ci. Car acheter une grande TV 40", c'est bien, mais si c'est pour être dégoûté par des pixels gros comme le poing ou pour devoir ensuite vous délester d'une somme identique pour un nouveau GPU, vous risquez de regretter votre expérience.

S'il existe bien des moniteurs 38" ultra wide, avec leur ratio de 24:10 (un peu plus large que le 21:9), ils totalisent une surface d'affichage sensiblement inférieure aux modèles 40" 16:9. Mais l'image est tellement étirée que l'immersion reste comparable.

Vous l'aurez compris, le monde des TV est scindé en deux, avec d'un côté les écrans Full HD (1920x1080), qui manquent de pixels mais restent cléments avec votre GPU, et de l'autre les UHD (3840x2160) qui fournissent une image et une netteté impeccable, mais vous forceront à investir au moins dans une GTX 1080. Le choix est impossible, et nous aurions plutôt tendance à opter pour la solution la plus qualitative, mais le mieux reste de passer en magasin et d'essayer d'appréhender la chose face aux murs de TV. Bien entendu, si vous ne jouez pas, ou à des jeux très légers, ou de très loin, optez pour un modèle UHD. L'affichage « hors-jeu » sera impeccable, et vous pourrez toujours réduire la définition du rendu 3D pour récupérer des FPS. Après tout, Minecraft en Full HD ou en UHD, sur une TV 50", ça ne change rien.

Il faudra aussi considérer la distance d'affichage. En règle générale, considérez qu'il faudra éloigner l'écran de vos yeux d'autant que sa largeur. Autrement dit, notre écran 28" est placé à environ 60 cm, tandis qu'on essayera de s'éloigner d'environ 90cm d'une TV 40" et on comptera carrément 1,20m pour une TV 55". Ceci dépendra bien entendu du type d'activité et de la définition de l'écran, mais c'est une bonne règle approximative.

Ainsi donc, envisagez votre bureau avec un peu de recul ( :D). Si vous n'avez pas assez d'espace pour reculer votre fauteuil/chaise, ce sera problématique. A ce sujet, les bureaux un peu larges font généralement 80 cm de profondeur. C'est donc plutôt suffisant pour un écran 40", mais au-delà, vous devrez considérablement vous éloigner du bord du bureau. A tel point qu'une TV 55" n'est souvent viable que pad en main, totalement désolidarisé de la table/bureau sur laquelle elle est posée.

Retour d'expérience

Votre serviteur, habitué à évoluer sur un duo d'écrans 31,5" s'est plié à l'essai avec 2 téléviseurs (40" et 52") tandis qu'il a aussi utilisé le moniteur Acer 43" (ET430K).

La différence entre le moniteur 43" et la TV 40" était vraiment perceptible en terme d'input lag, mais il faut avouer que le modèle testé n'était ni haut de gamme ni très récent. Si vous êtes un joueur acharné, vous devriez lorgner du côté des téléviseurs OLED, dont l'input lag est assez proche de celui des moniteurs PC, mais le surcoût est alors disproportionné (comptez 2000 € en UHD).

En ce qui concerne la TV 52", elle n'était pas viable en bureautique, ou alors en se concentrant sur une moitié de l'écran. Mais à tout moment, vous devrez tourner la tête pour accéder à la barre de notification ou au menu démarrer. Même en s'éloignant assez, le feeling restait assez surréaliste. Une impression d'être dans l'écran, mais sans rien y voir. Peut-être cela aurait-il mérité d'insister un peu plus, mais la TV 52' a vite été remisée au salon.

Il faut toutefois admettre que jouer à 1 m de l'écran, pad en main, a permis de redécouvrir certains jeux comme aucun autre écran ne l'aurait permis 2 autres membres de la rédac ont essayé le iiyama 40" (X4071UHSU). Le premier, habitué à 3 moniteurs 28" UHD, l'utilisait à environ 55/60 cm de distance et avouait être un peu limite. Un peu plus de recul n'aurait sans doute pas été de trop (ses 28" sont habituellement à 75 cm). Le second, ne reviendrait pas en arrière pour tout l'or du monde. 8 millions de pixels, c'est idéal pour cette surface, la seule qui l'ai convaincu de passer à la 4K. Et s'il devait repasser à plus petit, cela devrait se faire avec moins de pixels. La seule chose qui le ferait changer d'écran ? La même chose en 21 :9, pour encore plus d'immersion.

Devez-vous craquer ?

Le moins que l'on puisse vous conseiller, c'est d'essayer avant. Déplacez la TV de votre salon, et si vous n'en avez pas, allez en magasin et tentez de simuler votre configuration future. Mais comme toutes les bonnes choses de la vie, point trop n'en faut. Autour de 40" en UHD semble être un compromis idéal tant en versatilité qu'en immersion. Au-delà, vous aurez du mal à vous contenter de ce seul affichage pour votre PC (pensez à la bureautique ou au browsing web). Vous pouvez aussi conserver un moniteur classique et déporter une TV pour les jeux.

Concernant le coût, vous pouvez vous en tirer pour 600 € avec le modèle liyama X4071UHSU. Optez pour des TV de taille équivalente n'a guère d'intérêt, sauf si vous trouvez une très bonne affaire à moins de 500 € ou que vous comptez vous contenter d'un module Full HD. Mais alors, renseignez-vous et optez pour un modèle dont l'input lag reste dans la mesure du raisonnable. Si par contre vous voulez plus que 40", vous n'aurez pour le moment pas le choix que d'opter pour un téléviseur.